Mai 68

Mai 68 est un terme désignant de manière globale la totalité des mouvements de révolte survenus en France en mai-juin 1968.



Catégories :

Mai 1968 - Mai par année - Émeute - Mouvement social - Grève en France - Histoire de l'anarchisme - Anarchisme - Histoire du socialisme

Mai 68 est un terme désignant de manière globale la totalité des mouvements de révolte survenus en France en mai-juin 1968. Ces événements forment une période et une césure marquantes de l'histoire contemporaine française, caractérisées par une vaste révolte spontanée, de nature à la fois culturelle, sociale et politique, ou alors philosophique[1], dirigée contre la société respectant les traditions, le capitalisme, l'impérialisme, et , plus immédiatement, contre le pouvoir gaulliste en place. Enclenchée par une révolte de la jeunesse étudiante parisienne, puis gagnant le monde ouvrier et quasiment l'ensemble des catégories de population sur la totalité du territoire, elle reste principal mouvement social de l'Histoire de France du XXe siècle.

Les événements superposèrent principalement un mouvement étudiant et un mouvement ouvrier tous deux d'exceptionnelle ampleur. Au-delà de revendications matérielles ou salariales, et de la remise en cause du régime gaullien installé depuis 1958, ils virent se déployer une contestation multiforme de l'ensemble des types d'autorité. Une partie active du mouvement lycéen et étudiant revendiqua surtout la «libéralisation des mœurs», et au-delà, contesta la «vieille Université», la société de consommation, le capitalisme et la majorité des institutions et valeurs respectant les traditions.

Le «Mai français» s'inscrit d'autre part dans un ensemble d'événements dans les milieux étudiants et ouvriers de la plupart de pays. Il ne se comprend pas sans ce contexte d'ébullition générale de part et d'autre du Rideau de fer, surtout en Allemagne, en Italie, aux États-Unis, au Japon, au Mexique et au Brésil, sans oublier la Tchécoslovaquie du printemps de Prague ou la Chine de la Révolution culturelle.

En France, ces événements prennent cependant une coloration spécifique car d'importantes manifestations d'étudiants sont rejointes à partir du 13 mai 1968 par principale grève générale de la Ve République, dépassant celle survenue en juin 1936 lors du Front populaire[2]. Elle paralyse totalement le pays pendant plusieurs semaines et s'accompagne d'une recherche effrénée de prise de parole, d'une frénésie de discussions, de débats, d'assemblées générales, de réunions informelles dans la rue, au sein des organismes, des entreprises, des administrations, des lycées et des universités, des théâtres, des maisons de jeunes ou encore des maisons de la culture.

Explosion fréquemment confuse et complexe, quelquefois violente, plus fréquemment toujours ludique et festive, Mai 68 apparaît comme un moment d'illusion révolutionnaire lyrique, de foi ardente et utopique en la possibilité d'une transformation radicale de la vie et du monde. Ce que refléta surtout une prolifération de graffiti et de slogans imaginatifs : «Sous les pavés, la plage», «Il est interdit d'interdire», «Jouissez sans entraves», «Cours camarade, le vieux monde est derrière toi», «La vie est ailleurs», «Marx est mort, Dieu aussi, et moi-même je ne me sens pas particulièrement bien», etc.

Quelquefois qualifiée de «révolution manquée», et malgré le large recours à la rhétorique ainsi qu'aux symboles des révolutions françaises précédentes — barricades, drapeaux rouge et noir —, Mai 68 ne vit en réalité aucune volonté de conquête massive populaire illégale du pouvoir ni de dérapage vers la guerre civile, quoique plusieurs organisations et mouvances révolutionnaires, communistes et anarchistes, luttèrent activement dans le mouvement et participèrent à son organisation.

Les phases

Les historiens divisent classiquement le déroulement de Mai 68 en trois phases, une «période étudiante» (3-13 mai), une «période sociale» (13-26 mai) et une «période politique» (27-30 mai).

Avant comme après le rejet par la base, le 27 mai, des accords de Grenelle négociés par son Premier ministre Georges Pompidou avec les syndicats, Charles de Gaulle apparaît dépassé par les événements. Après sa disparition-surprise de 24 heures le 29 mai, il revient de Baden-Baden et reprend l'initiative en décrétant le 30 la dissolution de l'Assemblée nationale. La lassitude et le retournement de l'opinion publique, originellement favorable au mouvement, amènent un raz-de-marée gaulliste aux élections anticipées du 30 juin. Les grèves cessent progressivement courant juin, et les hauts-lieux de la contestation, tels que la Sorbonne et l'Odéon à Paris, sont évacués par la police.

Mai 68 a suscité dès l'époque de nombreuses controverses et interprétations divergentes sur sa nature, sur ses causes comme sur ses héritages. Il s'est prolongé, en ouvrant la voie aux nouvelles formes de contestations et de mobilisations des années 1970 (autogestion, écologie politique, mouvements féministes, décentralisation, «retour à la terre» et réveil des cultures provinciales, etc. ). Sans débouché politique, l'événement a eu un impact énorme sur le plan social et en particulier culturel, en étant à l'origine de nombreux acquis sociaux et de nombreuses réformes sociétales des années suivantes.

Origines

Contexte économique

Paradoxalement, la crise de Mai 68 survient au terme d'une décennie de prospérité inégalée. Au plan économique, c'est l'apogée des «Trente Glorieuses». La société de consommation s'est installée dans les mœurs, sans qu'on prenne vraiment conscience de toutes ses implications ni des déséquilibres mondiaux qui se développent.

Cependant, depuis quelques mois, ou alors une année, des symptômes importants d'une détérioration de la situation économique française ont fait leur apparition. Le nombre de chômeurs s'accroît régulièrement : début 1968, ils sont déjà près de 500 000. Les jeunes se trouvaient les premiers touchés et en 1967, le gouvernement doit créer l'ANPE. La grande grève des mineurs de 1963 a signalé le malaise d'un monde de la mine qui vit ses dernières années avant le début d'une crise fatale. Un nombre important de grèves se tiennent aussi entre 1966 et 1967, en région parisienne comme en province. Deux millions de travailleurs sont payés au SMIG et se sentent exclus de la prospérité, dont énormément d'OS des usines, de femmes ou de travailleurs immigrés. Les salaires réels commencent à baisser et les travailleurs s'inquiètent pour leurs conditions de travail. Les syndicats s'opposent ainsi aux ordonnances de 1967 sur la Sécurité sociale. Des bidonvilles existent toujours, dont le plus célèbre est celui de Nanterre, directement sous les yeux des étudiants.

Même les catégories les plus privilégiées ne sont pas sans motifs d'inquiétude : la massification de l'enseignement supérieur a entraîné sur les campus d'innombrables problèmes de locaux, de manque de matériel, de transports. En 1967-1968, le gouvernement reparle aussi de sélection, ce qui inquiète les étudiants.

Contexte politique

Au plan politique, le mouvement survient en une période d'usure de la République gaullienne, en place depuis 1958. En 1965, lors de la première élection présidentielle au suffrage universel direct tenue depuis 1848, le général de Gaulle a été mis en ballottage par François Mitterrand à la surprise générale. Aux élections législatives de 1967, sa majorité à l'Assemblée nationale se réduit à un seul siège. Les centristes tels Valéry Giscard d'Estaing assortissent de réserves critiques leur soutien au pouvoir (le «oui, mais» de 1967). Les démocrates-chrétiens tels Jean Lecanuet restent hostiles. La droite extrême et l'extrême droite ne pardonnent pas au général le procès de Vichy ni l'«abandon» de l'Algérie française. Les gaullistes s'irritent du maintien à Matignon de Georges Pompidou, jugé trop conservateur. Quant à ce dernier, une sourde rivalité l'oppose depuis 1965 au général de Gaulle, dont il lorgne en silence la succession. Le 13 mai 1968, le slogan «Dix ans, ça suffit !» traduira dans les défilés une certaine lassitude de l'opinion.

De Gaulle était arrivé au pouvoir en mai 1958 en jouant habilement de circonstances exceptionnelles (en apparaissant comme un recours après l'émeute du 13 mai et la prise du pouvoir par l'armée à Alger). Par conséquent, aux yeux de ses opposants, la légitimité de son régime reste fortement entachée par les soupçons d'un «coup d'État» originel. En dépit des succès du pouvoir (fin de la guerre d'Algérie et de la décolonisation, résorption de la crise économique, monétaire et financière, croissance soutenue) et de l'acclimatation progressive d'une constitution renforçant le pouvoir exécutif (régime semi-présidentiel, renforcé par l'élection du président de la république au suffrage universel direct et le recours aux référendums), ses pratiques autoritaires suscitent une critique croissante. Ainsi l'ORTF, détentrice du monopole de l'audiovisuel, se fait ouvertement le relais de la propagande officielle. À Paris, le préfet Maurice Papon, responsable des tueries du 17 octobre 1961 et du métro Charonne quelques années plus tôt à peine, n'a été remplacé qu'en 1967 par Maurice Grimaud, lettré humaniste venu de la gauche mendésiste. D'autre part, à 78 ans, la politique extérieure de prestige de Charles de Gaulle et son nationalisme d'une autre époque ne répondent pas obligatoirement aux attentes plus matérielles, culturelles et sociales de la majorité des Français. En avril 1968, un célèbre éditorial de Pierre Viansson-Ponté dans Le Monde constate que «la France s'ennuie», reprenant le constat prophétique de Lamartine sous le gouvernement Guizot quelques années avant la révolution de 1848.

Le Parti communiste français, de loin la première force de gauche, peine à se déstaliniser et a de fait cessé depuis longtemps de poursuivre des objectifs révolutionnaires. Les bureaucraties sclérosées d'URSS et d'Europe de l'Est répugnent les jeunes militants d'extrême gauche, dont le modèle se situe désormais plutôt du côté de Cuba ou de la Chine populaire. Énormément critiquent aussi le PCF — quelquefois nommé P «C» F — pour son peu d'empressement à critiquer la dérive de l'URSS entre les mains des révisionistes liquidateurs du socialisme.

Parallèlement, les gauches non-communistes ne parviennent pas à sortir de leurs divisions et de leurs discrédits. Aussi un espace est-il ouvert pour que des groupes «gauchistes» se multiplient, en marge des grandes organisations officielles (trotskistes, prochinois, etc. ). La politisation et l'agitation sont entretenues dans la jeunesse par exemple par les comités Viêtnam, constitués surtout de lycéens et étudiants, qui dénoncent «l'impérialisme américain» visible par la guerre du Viêt Nam. La guerre froide fait aussi naître des idées antinucléaires.

Origines culturelles

Mai 68 ne se comprend que dans un monde en rapide mutation. L'accélération de l'exode rural et de l'urbanisation, l'augmentation énorme du niveau de vie, la massification de l'éducation nationale et de l'Université, l'avènement de la culture des loisirs, du spectacle et des mass média, représentent des changements accélérés et sans qui ont précédé en moins d'une génération. Les années 1960 sont aussi celles de l'affirmation de la jeunesse comme catégorie socio-culturelle et politique à part entière. Surtout, la jeunesse a désormais sa propre culture, avec une presse qui lui est destinée, des émissions de radio particulièrement suivies (Salut les copains !) ou ses chanteurs attitrés (les Beatles, les Rolling Stones, Johnny Halliday, etc. ). Elle a aussi ses propres malaises et ses propres revendications (surtout en matière de liberté sexuelle) que les pouvoirs publics et le monde adulte tardent à comprendre.

Au plan religieux, la France, toujours particulièrement catholique, vient de suivre avec passion le Concile de Vatican II, qui a profondément rénové mais également ébranlé le catholicisme respectant les traditions, et en particulier les mouvements d'action catholique. Surtout, les Scouts de France représentant à l'époque une part non négligeable des jeunes chrétiens, ont modifié les rapports hiérarchiques dans leurs structures, remettant en cause à partir de 1964, un modèle de type militaire et introduisant la collégialité des décisions au sein des équipes. La Jeunesse étudiante chrétienne en ébullition doit être reprise en main par la hiérarchie dès 1964. Le mouvement des prêtres-ouvriers, dont la condamnation est levée en 1965, reprend son essor. Énormément de chrétiens se préoccupent de rénover les relations des fidèles aux autorités religieuses, de revisiter les pratiques et les dogmes, ou alors de réconcilier foi et révolution.

Sur le plan sociologique, la dynamique de groupe s'est répandue pendant les années 1960 dans les formations des responsables de l'ensemble des organisations et des entreprises. La mode est au débat.

Mais les clivages sociaux sont toujours extrêmement rigides. 92 % des étudiants viennent toujours de la bourgeoisie. Le paternalisme autoritaire est omniprésent. On commence à ouvrir des lycées «mixtes[3]», mais énormément d'établissements scolaires sont toujours réservés aux garçons ou aux filles uniquement. Les filles ne sont pas autorisées à porter le pantalon. Il est impossible de fumer dans un établissement ou, dans les universités, d'accéder pour les hommes aux internats de filles.

La France a autorisé l'usage de la pilule contraceptive dès 1967, mais elle est toujours peu répandue. L'éducation n'a pas encore connu de réformes structurelles et le décalage est criant entre les aspirations d'une jeunesse et les cadres moraux qu'ils ressentent comme dépassés.

Au plan philosophique, plusieurs auteurs ont eu une influence importante au moins sur une partie du mouvement, pendant et après : le freudo-marxiste Wilhelm Reich, dont le manifeste, La révolution sexuelle , est paru en 1936 ; le livre d'Herbert Marcuse L'Homme unidimensionnel, sous-titré Essai sur l'idéologie de la société industrielle avancée, paru en France en 1964 puis réédité en 1968 ; le Traité de savoir vivre à l'usage des jeunes générations de Raoul Vaneigem, paru en 1967 ; La Société du spectacle de Guy Debord, paru en 1967 ; et , plus tard, L'Anti-Œdipe de Gilles Deleuze et Félix Guattari, publié en 1972. D'autres penseurs comme Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron critiquent la «reproduction sociale» qui permet aux élites de conserver leur domination de génération en génération. À l'École normale supérieure de la rue d'Ulm, le philosophe communiste Louis Althusser a constitué une génération de penseurs marxistes-léninistes français, qui forment l'embryon des premières organisations maoïstes.

Cependant, peu des penseurs éminents de l'époque prendront part en personne au mouvement, dont l'explosion les surprendra tout autant que n'importe qui. Généralement, ils seront originellement perplexes, réservés ou alors hostiles.

Une partie de la jeunesse radicalisée regarde avec fascination vers les mouvements révolutionnaires du Tiers-Monde : Che Guevara, Fidel Castro, Ho Chi Minh servent de modèle, alors que l'irruption sur la scène chinoise des jeunes gardes rouges donnent l'illusion que la jeunesse comme telle peut avoir un pouvoir politique dans la société et remettre en cause l'autorité des adultes et des pouvoirs. On suit aussi attentivement les luttes menées aux Etats-Unis par le mouvement d'émancipation des Noirs, ou encore par les sit-in et les diverses recherches du mouvement hippie et étudiant (Berkeley). En avril 1968, des incidents retentissants opposent étudiants du Mouvement des étudiants allemands socialistes (Sozialistischer Deutscher Studentenbund) et autorités ouest-allemandes. Le caractère international de ces mouvements sert à replacer les événements français au sein d'une dynamique mondiale.

Origines immédiates

Le mouvement du 22-Mars, prenant le relais de la contestation menée par de petits groupes tels les anarchistes et les enragés de René Riesel, se fait connaître ce jour-là en occupant un étage de la tour administrative de la faculté de Nanterre. Sa principale revendication est la protestation contre des arrestations opérées quelques jours plus tôt lors des manifestations contre la guerre du Viêt Nam.

Le mouvement est porteur d'un parfait politique particulièrement libéral au sens des libertés individuelles et particulièrement critique vis à vis de la société de consommation, de l'autoritarisme, de l'impérialisme. Le mouvement joue aussi de thèmes touchant à la vie de l'ensemble des jours, comme par exemple le droit d'accès pour les garçons aux résidences universitaires des filles.

Il n'y a pas eu à proprement parler de «figures de proue» du mouvement qui est demeuré «multiforme» et sans organisation centralisée. Certains sont cependant devenus, a posteriori, des emblèmes du mouvement même si leurs discours, singuliers, ne sauraient résumer la diversité d'opinions qui existaient au sein des masses et si, pour certains, ce discours postérieur a quelquefois consisté à réécrire les événements. Parmi eux, Serge July, Daniel Cohn-Bendit. L'écrivain Robert Merle, prix Goncourt 1949 et professeur d'anglais à la faculté de Nanterre, a consacré un roman entier à la journée du 22 mars et celles qui l'ont précédée. On y retrouve énormément de leaders de l'époque, ainsi qu'une bonne analyse des causes et rêves du mouvement[4]. Cet ouvrage, sur les événements, est bien complété par celui de Kristin Ross sur les discours qui ont été tenus sur Mai 68, de 1968 à nos jours[5].

Les causes de ce mouvement sont diverses. Les analyses historiques tournent à la fois autour de l'idée qu'une grande rigidité cloisonnait les relations humaines et les mœurs et de la constatation d'un début de dégradation des conditions matérielles après la période de reconstruction suivant la Deuxième Guerre mondiale. À l'époque, de nombreux bidonvilles jouxtent la capitale surtout celui de Nanterre. Les étudiants qui se rendaient dans la faculté fraîchement construite découvrirent ce milieu, la pauvreté, la condition ouvrière. Le mécontentement naissant dans le milieu étudiant sera relayé par celui qui se profilait depuis plusieurs années dans le secteur ouvrier.

Résumé général des événements

Forces en présence

L'éclatement spontané de la crise prit totalement au dépourvu le pouvoir, mais aussi quasiment l'ensemble des organisations, partis et syndicats organisés. Le camp du pouvoir ne fut pas plus uni que celui de la contestation. Le Parti communiste français et son relais syndical, la CGT, refusèrent tout d'abord de joindre leur cause à celle des étudiants vus comme «bourgeois» et a fortiori de leurs dirigeants d'inspiration libertaire (tels Daniel Cohn-Bendit) ou issus des divers groupuscules «gauchistes». Ceux-ci étaient fréquemment eux-mêmes divisés («marxistes-léninistes» prochinois, trotskistes, etc. ) et incertains quant à l'attitude à avoir face au mouvement. Au sommet de l'État, la crise aggrava les divergences entre le général de Gaulle, peu compréhensif envers ce qu'il qualifie le 19 de «chienlit», et partisan d'une répression immédiate, et son Premier ministre, Georges Pompidou, qui préféra jouer la carte de la modération et de la compréhension pour mieux laisser le mouvement s'essouffler de lui-même. Les forces centristes et les gauches (Pierre Mendès France, François Mitterrand) tentèrent difficilement de canaliser vers la construction d'une alternative politique au régime gaullien, un mouvement beaucoup indifférent à la question de la prise du pouvoir.

Déroulement d'ensemble

Le vendredi 3 mai, la cour de la Sorbonne est occupée par 400 manifestants qui tiennent meeting sans heurt spécifique. Devant le risque d'une attaque des étudiants d'extrême droite (Occident, mouvement violent d'inspiration fasciste, annonce une marche sur l'établissement dans l'objectif avoué d'une confrontation brutale), elle est évacuée par une intervention policière musclée : plusieurs centaines d'étudiants sont arrêtés, dont Jacques Sauvageot, le dirigeant de l'UNEF, principal syndicat étudiant. Cette intervention des forces de l'ordre à la Sorbonne, à la demande du recteur Jean Roche, sans préavis ni négociations, est particulièrement mal vécue par les étudiants, qui se pensaient protégés par le statut universitaire. Les étudiants réagissent aussitôt par des manifestations violentes contre les forces de l'ordre : jets de pavés, puis barricades. Ces manifestations reprennent ensuite à l'annonce de peines de prison pour les manifestants, pendant lesquelles commencent à fleurir les slogans libertaires.

Jt20 p5.jpg

Le président du SNE-Sup (syndicat des enseignants du supérieur), Alain Geismar, décide de soutenir les manifestants. Les membres du Parti communiste et de certaines organisations d'extrême gauche (maoïstes, AJS) sont en premier lieu pris de court : pour eux, la révolution est censée venir des ouvriers, et non des étudiants ; qui plus est , les revendications du mouvement du 22-Mars leur paraissent «puériles» et «petit-bourgeoises» et en particulier «gauchistes». Après un moment de flottement, ils essayent cependant de gagner les ouvriers à cette «révolte». La CGT, pour sa part, ne les suit pas et son secrétaire général de l'époque, Georges Séguy, s'en expliquera plus tard devant les médias : «Cohn-Bendit qui est-ce ? Probablement faites-vous allusion à ce mouvement lancé à grand renfort de publicité qui, à nos yeux, n'a pas d'autre objectif que d'entraîner la classe ouvrière dans des aventures en s'appuyant sur le mouvement des étudiants». Mais la base de ces organisations respectant les traditions de gauche dépasse leurs responsables.

Dans la nuit du 10 au 11 mai, les étudiants occupant le Quartier latin dressent plusieurs dizaines de barricades qui sont finalement prises d'assaut dans la nuit par les CRS. On relève des centaines de blessés. Face à la répression policière, la population a tendance depuis les premiers jours à prendre surtout fait et cause pour les étudiants. A l'aube, syndicats et partis nomment à une démonstration de solidarité pour le surlendemain.

Le lundi 13 mai, une immense manifestation traverse Paris. Le syndicat CFDT parle d'un million de manifestants. La préfecture de police n'en concède même pas deux cent mille.

Le chef de l'État, le général de Gaulle, en voyage officiel en Roumanie du 14 au 19 mai, n'accorde originellement pas énormément d'attention à ces manifestations. Il laisse son Premier ministre Georges Pompidou s'en occuper : on dira de lui plus tard que «rares sont les hommes politiques, tel M. Pompidou, pour encaisser à ce point pendant les injures». Ce dernier a interrompu le 12 un autre voyage officiel en Afghanistan pour faire face à la situation. Il exige que les forces de police quittent la Sorbonne, pour calmer la situation. On croit tandis qu'il tergiverse et cède mais en réalité ce mouvement est tactique : il espère que les excès des étudiants déconsidéreront leur mouvement au regard de l'opinion (lettre citée par Raymond Aron dans ses Mémoires, p. 667). Sceptique face à cette ligne de modération tactique, de Gaulle reste pour l'heure à l'écart, en se réservant la possibilité d'intervenir si besoin.

Sans mot d'ordre aucun, ainsi qu'à la surprise des responsables de chaque camp, la grève générale symbolique prévue pour le 13 mai ne s'arrête pas à ce jour-là. Le mouvement ne fait au contraire que s'étendre rapidement dans le courant du mois : c'est la première grève générale sauvage de l'Histoire. C'est aussi la première fois qu'une grève générale paralyse un pays parvenu au stade de la société de consommation.

Des grèves et occupations d'usine spontanées se multiplient par conséquent jusqu'à la mi-mai. La première a lieu à l'usine Sud-Aviation Bouguenais (44) le 14 mai avec 2682 salariés. Le 22 mai, 10 millions de salariés ne travaillent pas (en grève ou empêchés de travailler). Les revendications sont à la fois respectant les traditions (augmentation des salaires, meilleures conditions de travail) et nouvelles. Il s'agit en effet de revendications qualitatives (pour plus d'autonomie, responsabilité du salarié, forme de cogestion des entreprises, etc. ).

Dans tout le pays, les portes s'ouvrent à n'importe quel citoyen, la parole se libère et devient pour quelques semaines la raison d'être des Français. Enthousiasmé ou catastrophé, dubitatif ou méditatif, chacun selon sa sensibilité participe ou observe. Des dialogues intenses se nouent dans les rues, entre inconnus, ainsi qu'à travers les générations.

L'un des symboles de ces lieux de débats est le théâtre de l'Odéon à Paris où on peut entendre s'affronter, dans des débats pris particulièrement au sérieux jour et nuit, quelques syndicalistes délégués de chez Renault, des ménagères du quartier, des étudiants, un groupe de jeunes de droite de Neuilly-sur-Seine venus en touristes, un autre groupe de lycéens d'une banlieue ouvrière, autres touristes, tel ou tel artiste célèbre, des professeurs, un conseiller municipal aux abois, un ou deux cadres d'entreprise catastrophés, pendant que dans les coulisses du théâtre, quelques échevelés de la libération sexuelle se livrent à des ébats spontanés et sans intimité.

À tout moment dans tel ou tel lieu de France, un militant de telle ou telle organisation, plus ou moins rompu à la dynamique de groupe en vogue, s'impose pour faire voter une «motion» en «assemblée générale» qui se perd dans un flot de tracts et achève quelquefois sa course dans un article de presse, si un journal peut paraître, suivant le destin d'une bouteille à la mer lancée à Maubeuge et ouverte dans l'Île de la Cité. On découvrira des attitudes personnelles étonnantes, comme celle du député Valéry Giscard d'Estaing allant seul à l'aube à la rencontre des ouvriers de Billancourt qui occupent leur usine.

Les accords de Grenelle négociés entre Georges Pompidou et les syndicats laissent croire un moment à une sortie de crise en échange d'une fournée d'acquis sociaux sans précédent depuis la Libération ou alors depuis les accords Matignon du 7 juin 1936 : droit syndical dans l'entreprise, augmentation du SMIG de 35 %, paiement des jours de grève à 50 %, etc. Cependant, la base boude les accords et aucune reprise du travail ne se manifeste.

La crise devient politique. Tandis que le général de Gaulle apparaît flottant et dépassé (son intervention télévisée du 24 mai, proposant un référendum, est tombée à plat de son propre aveu, et n'a suscité qu'une nouvelle nuit de barricades parisiennes, plus violente que la précédente), une alternative semble s'esquisser non sans mal à gauche. Certains comme François Mitterrand parlent d'un gouvernement provisoire qui serait dirigé par Pierre Mendès France. C'est aussi vers ce dernier que se tournent énormément de regards, jusque de la part des centristes et de certains hommes de droite, et c'est en lui aussi que mettent leurs espoirs les organisateurs du meeting du stade Charléty (CFDT, UNEF et animateurs de Mai), réunis le 27 mai au soir. Quant au PCF, dubitatif mais menacé d'être débordé, il fait défiler ses troupes en bon ordre le 29 pour exiger un «gouvernement populaire» aux contours imprécis mais dont il serait une partie prenante principale.

C'est ce 29 mai qu'au plus fort de la contestation et du désarroi, de Gaulle disparaît pendant plusieurs heures, à la surprise générale. Cela plonge Pompidou et la majorité dans une certaine angoisse. Sans prévenir personne, de Gaulle va consulter son ancien compagnon de lutte le général Massu en Allemagne, au lieu de se rendre comme annoncé à sa résidence secondaire de Colombey. Veut-il s'assurer symboliquement du soutien de l'armée, dont nul ne souhaite en réalité l'intervention ? Veut-il déconcerter l'adversaire et jouer sur la peur du vide, tandis que l'opinion commence à se retourner devant l'absence de perspective du mouvement ? Épuisé et déconcerté, a-t-il eu un authentique moment de passage à vide[6] ou alors la tentation de se retirer ? Il semble que toutes ces raisons se soient conjuguées.

Revenu à Paris le lendemain midi 30 mai, de Gaulle accepte la proposition de Georges Pompidou de dissoudre l'Assemblée nationale pour organiser de nouvelles élections législatives[7]. Le Premier ministre estime avec justesse que le mouvement étudiant, poursuivant la grève en dépit de l'accession à ses revendications, s'est rendu impopulaire. L'après-midi, tandis qu'une marche de soutien au gouvernement, menée par André Malraux[8] et Michel Debré, réunit sur les Champs-Élysées trois cent mille manifestants selon la préfecture de police et un million selon les gaullistes, de Gaulle annonce la dissolution par la radio dans un discours bref qui change brusquement la donne (voir Charles de Gaulle pour quelques extraits).

La situation se renverse progressivement. Après plusieurs épisodes violents début juin — violents affrontements à Renault-Flins les 7 et 10 ainsi qu'à Peugeot-Montbéliard-Sochaux le 11 —, les grèves cessent progressivement. Une troisième «nuit des barricades» au Quartier latin les 11 et 12 juin n'est plus que le fait d'irréductibles. Le 12 juin, plusieurs organisations «gauchistes» sont dissoutes. L'Odéon et la Sorbonne sont évacués sans difficulté par la police quelques jours plus tard. De nombreux journalistes grévistes de l'ORTF sont licenciés, alors que la répression s'abat sur certains leaders du mouvement, tels Daniel Cohn-Bendit, interdit durablement de séjour[9]. Les élections des 23 et 30 juin s'achèvent sur un raz-de-marée électoral pour les gaullistes, dont le groupe emporte la majorité absolue à l'Assemblée, situation sans précédent. Mais ces jours ont aussi porté en germe un net refroidissement des relations entre Georges Pompidou et le général de Gaulle : aussitôt les élections remportées, ce dernier le remplace par Maurice Couve de Murville à la tête du gouvernement.

Néanmoins, les Français ont appris à apprécier en ces jours-là le vrai vainqueur de la crise : de Gaulle n'est plus irremplaçable et , après l'échec du référendum du 28 avril 1969, suivi de sa démission immédiate, c'est sans surprise que Georges Pompidou accédera à l'Élysée. De Gaulle, pour sa part, votera depuis l'Irlande où il prend quelques jours de vacances avec son épouse.

L'échec politique du mouvement n'empêche pas un certain succès social et culturel : jamais ratifiés, les accords de Grenelle sont tacitement appliqués, surtout le passage du salaire minimum à 600 F par mois (le pouvoir d'achat du franc de l'époque est un peu supérieur à celui de l'euro de 2002, voir INSEE). L'Université napoléonienne est démantelée fin 1968 par la loi Faure, la décentralisation relancée. Si la tentative du Premier ministre Jacques Chaban-Delmas (1969-1974) de satisfaire certaines aspirations de Mai 68 se heurte au plus grand conservatisme de Pompidou, d'autres demandes seront satisfaites par le président Valéry Giscard d'Estaing en 1974 (dépénalisation de l'IVG, fin de la censure, majorité civile à 18 ans, etc. ), puis par la gauche au pouvoir après 1981 (libéralisation de l'audiovisuel, loi Defferre sur la décentralisation, etc. )

Chronologie des événements

Conséquences de Mai 68

Au plan politique

Les accords de Grenelle

Une augmentation de 35 % du SMIG à 600 F par mois et de 10 % des salaires, la création de la section syndicale d'entreprise, actée dans la loi du 27 décembre 1968 et une quatrième semaine de congés payés, sont entre autres conclues lors des accords de Grenelle, suite à des négociations menées surtout par le jeune haut fonctionnaire Jacques Chirac, et la reprise du travail s'effectue progressivement au début du mois de juin. La police et la gendarmerie évacuent au fur et à mesure les différents lieux occupés.

Les morts

Quoiqu'on crédite fréquemment le préfet de police de Paris, Maurice Grimaud, d'avoir évité tout mort à Paris, les événements ont cependant causé, à l'échelle nationale, la mort directe de cinq personnes : le commissaire de police René Lacroix[10], écrasé par un camion à Lyon; le gréviste de 24 ans Pierre Beylot, ouvrier à l'usine Peugeot de Sochaux-Montbéliard (Doubs), tué de deux balles ; un autre gréviste de la même usine, Henri Blanchet, 49 ans, qui est déséquilibré par une grenade offensive, tombe d'un parapet et meurt le crâne fracturé ; ou encore le lycéen Gilles Tautin (17 ans), noyé dans la Seine après la poursuite par des CRS aux abords de l'usine de Flins (Yvelines) mais aussi Philippe Mathérion, 26 ans, dont on retrouve le corps au petit matin sur la barricade de la rue des Écoles[11]. Enfin, quoique la mémoire de ces événements ait été recouverte jusqu'à la grève générale de 2009, et ceux-ci peu connus en-dehors de l'île au moment des faits, les émeutes de mai 1967 en Guadeloupe ont fait des dizaines de morts...

Le décret de dissolutions du 12 juin 1968

Le décret présidentiel du 12 juin 1968 dissout onze mouvements jugés extrémistes, en application de la loi de janvier 1936 (modifiée) «sur les groupes de combat et milices privées», dont :

Le décret épargne cependant l'organisation d'extrême-droite Occident. René Capitant, ministre de la Justice, argue : «Le mouvement Occident a employé la violence, quelquefois, mais il ne s'est pas dévoilé comme un mouvement subversif.»

La dissolution de l'Organisation communiste internationale, de la Fédération des étudiants révolutionnaires et du groupe Révoltes sera annulé, suite à trois requêtes (l'une émanant de Pierre Boussel, alias Lambert) pour annulation du décret en raison d'un excès de pouvoir, accepté par le Conseil d'Etat [12].

Dissolution de l'Assemblée nationale le 30 mai 1968

Les élections législatives de juin 1968 voient la très large victoire des gaullistes, regroupés dans le parti renommé pour l'occasion Union pour la défense de la République. On s'est énormément interrogé sur ce retournement de la peur, tant les médias donnaient l'impression que la population penchait pour le mouvement étudiant. Au fond personne à gauche n'avait donné l'impression de maîtriser ce qui se passait et la solution paraissait être provisoirement en dehors du mouvement, dans la stabilité institutionnelle.

Référendum sur la régionalisation et le rôle du Sénat du 27 avril 1969 et départ du général de Gaulle

Le général de Gaulle avait souhaité un référendum en mai 1968. Georges Pompidou avait plaidé et obtenu la dissolution de l'Assemblée nationale. De Gaulle ne renonce pas à son projet de référendum. Il perçoit que mai 1968 a mis en exergue un besoin de démocratie plus direct et plus proche du peuple. Il imagine de décentraliser certains lieux de décision et de refonder le Sénat en changeant profondément ses critères de recrutement. C'est l'objet de ce référendum. Il met tout son poids politique dans la balance en promettant de partir si les Français répondent «non». Le non l'emporte avec 52, 41 % (80, 13 % de votants, 77, 94 % de suffrages exprimés). Comme il l'avait indiqué, le général de Gaulle part.

Aux plans culturel, économique et social

En général Mai 68 sera la plus grande contestation de l'ordre existant. La singularité française sera le lien entre la contestation intellectuelle et le monde ouvrier. [13] Mai 68 est une ouverture brutale de la culture française au dialogue social et médiatique, qui s'infiltrera dans l'ensemble des rouages de la société et de l'intimité familiale, et une étape importante de prise de conscience de la mondialisation de la société moderne (après les guerres «mondiales») et de la remise en cause du modèle occidental de la «société de consommation».

On assiste à une désaffection des Français pour la sphère publique et politique et pour le militantisme généralement.


Les événements de mai 1968 marquent une division politique qui a des répercussions dans la société française. A titre d'exemple, le schisme de l'université des sciences humaines de Lyon II. Aujourd'hui, on situe quelquefois les personnalités politiques selon le «côté» des barricades où elles se situaient. Le qualificatif péjoratif de «gauchiste», créé par Lénine en 1920 («La maladie infantile du communisme»), entre dans le langage familier.
De nouvelles valeurs apparaissent. Elles sont surtout centrées autour de l'autonomie, la primauté de la réalisation personnelle, la créativité, la pluridisciplinarité et la valorisation de l'individu impliquant le refus des règles respectant les traditions de la société et la remise en cause de l'autorité. La redéfinition de nouvelles règles se construit autour de l'idée d'autogestion et du communautarisme. Le concept d'autogestion sera concurrencé par celui de cogestion qui sera cher à Edgar Faure dans sa réforme de l'enseignement qui suivra et en général particulièrement en vogue dans les organisations politiques inquiètes de cette évolution jugée «anarchique».
Le conflit de la société des montres «Lip», conduit par Charles Piaget du Syndicat CFDT, à Besançon en 1973, sera une illustration particulièrement médiatisée de cette évolution, avec une expérience de mise en œuvre de l'autogestion de l'entreprise qui fera couler énormément d'encre.
Cette influence aura aussi des conséquences en 1973 dans des mouvements de remise en cause de l'armée et de la force de frappe nucléaire et en général dans les mouvements écologiques (Brice Lalonde) et anti-militaristes (la lutte contre l'extension du camp militaire des jeunes paysans du Larzac, dont est issu José Bové, le courant de la Non-violence) et les fameuses ONG comme «Médecins Sans Frontières» (Bernard Kouchner), directement issues de la prise de conscience planétaire des mouvements de Mai 68. C'est aussi la période de l'apparition de l'idée de «Halte à la croissance ?» (1972) titre d'une publication du Club de Rome fondé en 1968.
Curieusement, si on en croit le magazine L'Expansion, le rythme annuel d'augmentation de la productivité «s'accrut» pendant les trois années qui suivirent Mai 68. Il est clair qu'avec la victoire des gaullistes le 30 mai 1968 pour réprimer le mouvement de mai 68 et casser le mouvement, l'objectif politique n'allait pas dans le sens des revendications des manifestants contre qui les gaullistes s'étaient livrés à un bras de fer.

On peut noter l'enthousiasme de certains journalistes comme Jacques-Arnaud Penent dans le journal Combat.

L'encyclique Humanæ vitæ, publiée en juillet 1968, est en particulier réputée pour son refus de la contraception.
La communauté œcuménique des Frères de Taizé devient l'un des pôles structurant de ce bouleversement. Au début des années 1970, jusqu'à quarante mille jeunes, venus certes du monde entier, mais énormément de France, se rassemblent autour d'eux chaque semaine de Pâques dans le petit village bourguignon de Taizé, qui compte d'ordinaire cinquante habitants. Chacun est invité à participer au «Concile des jeunes ». On crée des «fraternités» dans le monde communiste, comme dans le monde occidental ou en Amérique latine, à l'image des premiers chrétiens et auprès des plus pauvres. Ces extraits de textes de Taizé expriment le bouleversement chrétien en écho aux événements de mai 68 : «Le Christ ressuscité vient animer une fête au plus intime de l'homme», «Il va nous donner assez d'imagination et de courage pour devenir signe de contradiction». Ce «signe de contradiction» deviendra ultérieurement «signe de réconciliation».
À cette époque s'augmente aussi le mouvement des prêtres ouvriers et le mariage des prêtres. En particulier le nombre de pratiquants dans les églises occidentales respectant les traditions va suivre une décroissance énorme et traumatisante pour les responsables religieux.

Cause ou conséquence ?

Les statistiques mettent en évidence 1963 et non 1968 comme date de premier changement des tendances sociologiques en France. De 1946 à cette date, les Français se marient en effet de plus en plus tôt et affirment dans les enquêtes une vision de plus en plus positive de l'avenir. Ces deux indicateurs se renversent néenmoins dès l'année 1964. Les facteurs de ce retournement de 1963 sont complexe à discerner, entre l'effort d'adaptation indispensable à l'intégration d'un million de rapatriés, les premiers résultats du concile Vatican II, le traumatisme causé par l'assassinat de John Kennedy, etc.

Quelques slogans soixante-huitards, rédigés et scandés

En réponse aux propos du Général de Gaulle :

En réponse à la violente répression, des affiches sérigraphiées disent :

Bibliographie

Films

Chansons

Émission radiophonique

Chronique de Mai - Mai 68, vingt ans après... de Dominique Chagnaullaud, série de sept émissions d'une heure réalisées par Jean-Jacques Vierne à l'occasion du 20e anniversaire des événements. Première diffusion sur France Culture entre le 1er et le 9 août 1988. A base d'archives sonores, ces chroniques reprennent les principaux événements de Mai 68, de Nanterre à sa fin :

Notes et références

  1. Selon le philosophe Vincent Cespedes (in Mai 68, La philosophie est dans la rue !, Larousse, coll. «Philosopher», 2008), «en mai-juin 1968, la philosophie est dans la rue. Révolution par la philosophie, mais également révolution des philosophies. (…) Les "fils de bourgeois" n'ont pas "joué aux prolétaires" (vanne bien connue des anti-Mai)  : ils ont philosophé avec. Des millions de gens ont cessé d'être obsédés par l'aménagement de leur carrière ou de leur vie privée, pour philosopher ensemble. C'est l'événement central de Mai, celui qui articule l'ensemble des autres et les rend envisageables ; sous la disparité des luttes spécifiques, leur unité.»
  2. Kristin Ross, Mai 68 et ses vies ultérieures, éd. Le Monde diplomatique / Complexe.
  3. Le premier lycée mixte (à partir de la classe de seconde) a été ouvert à Rambouillet en 1960 sous le nom évocateur de «Lycée mixte d'État de Rambouillet» (aujourd'hui Lycée Louis-Bascan)
  4. Derrière la vitre, Gallimard, 1970, 421 p., (ISBN 2070366413) .
  5. Mai 68 et ses vies ultérieures, Le Monde diplomatique – éd. Complexe, 2005, 222 p., (ISBN 2804800202) .
  6. Cette version sera celle affirmée par le général Massu dans ses mémoires
  7. Pour les débats parlementaires, l'échec de le motion de censure et la position des différentes forces politiques en présence, voir «Mai 68 en débats», Parlement (s), Revue d'histoire politique, n°9, 2008 : Discours de Pompidou et Mitterrand prochainement en ligne ici
  8. Malraux qualifiera plus tard ces événements de «crise de civilisation», indiquant ainsi leur gravité
  9. Il reviendra cependant clandestinement donner une conférence de presse unique en France, ayant teint ses cheveux pour être moins identifiable, et proposé un «appel du 18 joint» qui restera sans suite
  10. La dix-neuvième promotion de commissaires de police issus de l'école nationale supérieure de la police, entrés en fonction en 1968, porte son nom. Voir le rapport Rousso (2004), p. 25
  11. http ://libestrasbourg. blogs. liberation. fr/actu/2008/05/juin-meurtrier. html
  12. Conseil d'Etat statuant au contentieux, N° 76230 76231 76235, Publié au recueil Lebon, M. Henry, rapporteur M. Bertrand, commissaire du gouvernement. Lecture du mardi 21 juillet 1970.
  13. Kristen Ross. ibid

Vidéos


Voir aussi

Liens externes



Recherche sur Google Images :



"Libertaire Mai 68"

L'image ci-contre est extraite du site pagesperso-orange.fr

Il est possible que cette image soit réduite par rapport à l'originale. Elle est peut-être protégée par des droits d'auteur.

Voir l'image en taille réelle (520 x 483 - 67 ko - jpg)

Refaire la recherche sur Google Images

Recherche sur Amazone (livres) :




Ce texte est issu de l'encyclopédie Wikipedia. Vous pouvez consulter sa version originale dans cette encyclopédie à l'adresse http://fr.wikipedia.org/wiki/Mai_68.
Voir la liste des contributeurs.
La version présentée ici à été extraite depuis cette source le 10/12/2009.
Ce texte est disponible sous les termes de la licence de documentation libre GNU (GFDL).
La liste des définitions proposées en tête de page est une sélection parmi les résultats obtenus à l'aide de la commande "define:" de Google.
Cette page fait partie du projet Wikibis.
Accueil Recherche Aller au contenuDébut page
ContactContact ImprimerImprimer liens d'évitement et raccourcis clavierAccessibilité
Aller au menu