Capitalisme
Le capitalisme est un dispositif économique et social.
Recherche sur Google Images :
Source image : dutron.wordpress.com Cette image est un résultat de recherche de Google Image. Elle est peut-être réduite par rapport à l'originale et/ou protégée par des droits d'auteur. |
Définitions :
- Dispositif économique fondé sur la recherche du profit au moyen d'investissements, de spéculations ou de manipulations de capitaux.... (source : collegeahuntsic.qc)
Le capitalisme est un dispositif économique et social.
Les définitions du terme se distinguent par les poids différents qu'elles accordent aux caractéristiques suivantes :
- la propriété privée des moyens de production,
- la recherche du profit et de sa justification (ou l'absence de ),
- la liberté des échanges économiques et de la concurrence économique au sein du marché,
- l'importance du capital, les possibilités de l'échanger (particulièrement en bourse), de l'accumuler et de spéculer et
- la rémunération du travail par un salaire.
Dans une première définition, le capitalisme est entièrement défini par la propriété privée des moyens de production. En effet celle-ci implique le droit de disposer librement des biens en question et des fruits de leur utilisation, par conséquent de les échanger librement avec d'autres agents. Dans ce régime, les propriétaires de moyens de production peuvent arbitrer de diverses façons entre le souci de servir les consommateurs, la recherche du profit et l'accumulation de capital, faisant ainsi de la recherche du profit monétaire et de l'accumulation de capital des possibilités offertes aux agents, mais pas des éléments de la définition du capitalisme. On considère néanmoins qu'en régime capitaliste, le mobile principal de l'activité économique est la recherche du profit qui trouve sa contrepartie dans le risque[1].
Une deuxième définition, d'inspiration marxiste, met en avant la recherche du profit, l'accumulation de capital, le salariat et le fait que les travailleurs ne sont pas propriétaires de leurs outils. Au contraire de la première, cette définition admet la possibilité d'un capitalisme d'État où l'ensemble des ressources et l'ensemble des moyens de production seraient propriété d'un État. Ce régime est alors dénoncé, comme le capitalisme généralement, puisque les moyens de production sont utilisés dans l'intérêt du groupe au pouvoir, comme le ferait une personne privée, et non dans l'intérêt de la collectivité.
Dans les sociétés réelles, les cinq caractéristiques ci-dessus peuvent exister indépendamment les unes des autres, et chaque trait peut être plus ou moins prononcé. La propriété des ressources et moyens de production est en fait fréquemment partagée entre des individus, groupements et des États, donnant naissance à une gamme continue de sociétés d'économie mixte. D'autre part, la séparation entre les rôles de détenteur de capitaux (rémunéré par le profit) et de travailleur (rémunéré par un salaire) tend à devenir plus floue, ces derniers pouvant posséder une part plus ou moins grande des moyens de production, dans un contexte de plus en plus mondialisé.
De même, la propriété privée des ressources ou moyens de production peut cœxister avec un haut degré d'interventionnisme de la part de l'État, par exemple la fixation des prix et des conditions d'échange, que condamne théoriquement le libéralisme économique. De telles pratiques peuvent être souhaitées par certains propriétaires privés ou publics de ressources et moyens de production qui y voient un moyen de protéger et augmenter leurs profits en demandant à l'État de les protéger contre la concurrence, peut-être contre la volonté des consommateurs.
Historique du terme
Capitalisme et capitaliste, dérivé de capital, a en premier lieu signifié (1753[2]) l'état de la personne qui possède des richesses. Le sens moderne est donné par Richard de Radonvilliers en 1842. Il est repris par Pierre Leroux (1848), William Thackeray (1854, première apparition en anglais), Pierre Joseph Proudhon (1867), Louis Auguste Blanqui (1869), parmi d'autres. Karl Marx et Friedrich Engels parlent de forme capitaliste de production («kapitalistische Produktionsweise»), puis dans Le Capital de capitaliste, tandis que le terme "capitalisme" n'est employé que deux fois dans la totalité de "Le Capital" (tome II) et "Théories sur la plus-value" (tome II) .
Au début du XXe siècle, le terme est de plus en plus utilisé, comme avec Max Weber dans L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme en 1904. L'analyse de l'émergence du capitalisme selon Max Weber est désormais une référence : le capitaliste (pour des raisons que Weber analyse comme religieuses) renonce à consommer ses biens tout en voyant dans leur quantité un indicateur de conduite de sa vie ; il s'organise par conséquent de façon rationnelle et méthodique dans l'unique but de produire, et il accumule et investit ses biens pour en produire de plus en plus, non pas dans un but de consommation future ou de sécurité, mais dans une logique de pure croissance. C'est là, et uniquement là, qu'il apparait une rupture majeure comparé aux dispositifs antérieurs, qui fonctionnaient (à l'exception des dispositifs primitifs) aussi au moins en partie sur la recherche de profit et l'accumulation de capital.
C'est en 1906 que Werner Sombart parle de capitalisme moderne, celui dont il est question ici.
Le capitalisme est à l'origine un concept, sociologique, d'analyse du fonctionnement économique de certaines sociétés.
On oppose alors le capitalisme
- à l'économie primitive, où les échanges sont marginaux et chaque groupe exploite la nature pour son propre compte ;
- à l'économie de potlatch, où les échanges, même importants, ne visent pas à une accumulation de capital (ni quelquefois même à la consommation : il arrive que les biens soient détruit purement et simplement à l'issue de l'échange), mais à une démonstration symbolique de puissance statutaire ;
- au communisme, qui sert à désigner en général une théorie d'organisation politique, sociale et économique sans classe sociale et sans État, censée bénéficier de la mise en commun des moyens de production et des biens de consommation pour répondre aux besoins de chacun ;
- au socialisme d'État, où la propriété privée est réduite au minimum, et où tout le capital productif est géré collectivement ; cependant, dans ce contexte économique, on trouve aussi le terme de capitalisme d'État, que certains (socialistes ou non) utilisent pour désigner l'économie où l'État est seul et unique propriétaire de capital, ce qui n'est en fait, de leur point de vue, qu'un capitalisme étatisé[3].
On notera d'autre part que les formes politiques sont rarement «pures» en pratique, de sorte que le capitalisme cœxiste particulièrement beaucoup avec les autres dispositifs. De nombreux théoriciens préconisent même explicitement des formes mixtes, avec des dosages variés selon le domaine et l'objectif.
Le capitalisme est dépendant du dispositif politique et législatif en place. Il nécessite :
- une protection juridique de la propriété privée et des droits de propriété intellectuelle (brevetage... ) ;
- des moyens pour faire respecter cette propriété (Justice, Police, Armée).
Il est couramment admis qu'un État est indispensable pour remplir ce rôle. Mais dans la réalité, le capitalisme fonctionne particulièrement beaucoup (et même principalement, pour le grand commerce international) sur la base d'un arbitrage privé, où l'État n'intervient qu'à titre d'acteur potentiel en dernier ressort (sachant qu'il ne faut pas négliger l'effet économique d'une simple possibilité d'intervention). On notera aussi que les anarcho-capitalistes considèrent que l'État est illégitime et dangereux, et qu'on peut idéalement s'en passer en s'appuyant sur le droit naturel, sa propre capacité de défense, et des organismes privés. Pour eux, le capitalisme apparaît à la fin du XVIIIe siècle, puis est décrit et théorisé par Karl Marx au milieu du XIXe siècle.
Historique et formes du capitalisme
Les premières formes de capitalisme sont arrivées aux environs du XIIe siècle en occident dans la ville de Bruges (en Belgique) qui fut aussi, avant Anvers, le centre boursier mondial comme l'est actuellement Wall Street.
Le capitalisme est le produit d'initiatives et d'adaptations successives au cours du temps. Il a pris diverses formes, qui pour la majorité cœxistent toujours aujourd'hui et continuent d'évoluer.
Formes de capitalisme
De nombreux auteurs distinguent plusieurs formes de capitalisme, selon la nature des moyens de production qui prédominent ou qui leur semblent prédominer dans une société. Ils repèrent ainsi, selon les circonstances historiques :
- un capitalisme à base foncière, exploitant les rentes constituées par les différences de rendement agricole ;
- un capitalisme minier, interférant avec la politique internationale lorsque le contrôle des ressources relève du pouvoir politique ;
- un capitalisme industriel, exploitant un stock de machines onéreuses concentrées dans des manufactures ou usines ; la place accordée aux travailleurs est alors variable, elle peut se diminuer à un rôle d'objet sans plus d'importance qu'un cheval ou qu'un tas de charbon, ou obtenir plus de respect et de considération comme dans le fordisme.
Les critiques du capitalisme, ou de certains de ses aspects, utilisent aussi le terme de capitalisme financier à des fins dépréciatives. Ils l'emploient pour critiquer les bourses, les banques ou ceux qu'ils définissent comme des spéculateurs.
La mutation des conditions de production fait appel de plus en plus au capital-savoir, on parlerait alors de capitalisme cognitif.
Michel Albert a en outre proposé dans Capitalisme contre capitalisme (1991) une distinction qui a remporté un certain succès entre :
- le capitalisme rhénan, caractérisé par un poids majeur des banques (détentrices de près de la moitié des actions des sociétés cotées, et particulièrement influentes sur les autres entreprises), et une influence importante de syndicats puissants ;
- le capitalisme anglo-saxon, désignant une forme où ce sont les actionnaires individuels, fréquemment regroupés dans des fonds d'investissement, dont les fonds de pension pour les futurs retraités, qui ont l'influence déterminante.
Cette typologie a été reprise par exemple par Alberto Alesina dans The future of Europe, Reconstitu or Decline (2006).
Mécanismes
Dans un régime capitaliste, les biens qui forment le capital, appartiennent à des personnes ou des entreprises privées. Les rôles de détenteur de capitaux, d'apporteur de travail et d'entrepreneur y sont dissociés et peuvent être joués par des individus différents, chacun cherchant à satisfaire ses propres objectifs. Si pour l'analyse théorique il est commode d'insister sur cette séparation, en pratique un même individu peut jouer simultanément ou successivement plusieurs de ces rôles, en plus de son rôle de consommateur.
Une des caractéristiques principales du capitalisme est de fonctionner sur la base de la recherche du profit par le capitaliste. Le profit effectivement réalisé dépend, lui, de la réaction du marché aux offres des entrepreneurs qui mettent en œuvre ce capital.
Dans le régime capitaliste, l'existence et le développement de l'entreprise sont soumis au jugement de ceux qui lui ont apporté leurs capitaux. Ils supportent le risque de l'entreprise sur leurs capitaux, et attendent par conséquent une rémunération de ces capitaux supérieure à celle d'une épargne classique, la différence étant une prime de risque. Cette pression subie par les producteurs tend à mettre les facteurs de production entre les mains de ceux qui savent en dégager la meilleure rentabilité.
Cas spécifique de certaines entreprises
Si, généralement, le profit s'entend comme une maximisation financière pour le capitaliste comme investisseur, il existe des cas spécifiques où le capitaliste recherche une maximisation à un autre titre que celui d'investisseur (d'une certaine façon, il réclame un profit en nature et non en argent). C'est surtout le cas pour les sociétés où l'investissement dans l'entreprise est subsidiaire parce que l'investisseur assume d'autres rôles, et que le capital n'est pas totalement scindé des autres éléments de l'entreprise.
Travailleurs indépendants
Un secteur particulièrement important dans les pays d'économie de marché, sont les travailleurs indépendants. Le détenteur du capital a la particularité d'être à la fois le travailleur unique et le chef d'entreprise.
Une variante de cette modalité est la société familiale, dont le capital est entièrement ou surtout détenu par un groupe d'individus proches, qui tient aussi les commandes de l'entreprise. Il n'a de compte à rendre à personne en-dehors du groupe. Des entreprises importantes, quelquefois de taille mondiale, sont ainsi en dehors de la bourse, sans que toutes soient familiales cependant.
Coopératives, mutuelles, associations, GIE, et l'économie sociale
Très le plus souvent, les entreprises de l'économie sociale, qui regroupent les coopératives, les associations et les mutuelles :
- lient l'obtention du service à une adhésion (historiquement fréquemment soumise à une condition de statut de la personne, mais de plus en plus libre) ; par conséquent,
- elles ont un capital détenu par les usagers (mutuelles, associations, coopératives de crédit et de consommation) ou par leurs salariés (coopératives de production et SCIC), et
- elles ont un capital variable, au gré des entrées et sorties de membres ;
- appliquent le principe démocratique «une personne, une voix» pour les prises de décision, mais
- préfèrent traduire le profit en service «en nature», au profit de leurs adhérents (dans le cas où les bénéficiaires du service ne sont pas les adhérents, mais une population qu'il s'agit d'«aider», on peut discuter de savoir s'il s'agit toujours d'une forme capitaliste car pour prendre l'exemple des assurances ou des mutuelles payantes, le profit engrangé est supérieur à l'aide apportée - car les versements se poursuivent qu'on rencontre ou non l'accident-).
Ces entreprises peuvent tenir une place importante dans certains secteurs économiques (par exemple en France : la banque, l'assurance, la santé ; les coopératives agricoles ont même une place dominante dans le négoce et la transformation agricole).
Rien n'oblige les adhérents à être des personnes physiques : ainsi, des personnes morales et surtout des entreprises peuvent aussi s'associer sous cette forme. Un Groupement d'intérêt économique leur sert à coopérer sur certains points non stratégiques ou pour lesquels la concurrence à moins d'avantage que la coopération. Cela leur sert à mettre en place des services communs (carte bancaire, approvisionnement de magasin, marketing, exportation, recherche, etc. ). Deux des trois plus grands dispositifs français de grande distribution sont fabriqués autour d'un GIE, dont les adhérents sont les magasins distributeurs, propriétés de capitalistes locaux.
Le terme d'économie sociale recouvre des sociétés et groupes particulièrement divers. Ce secteur représente à peu près 10% des emplois en France.
Institutions
Pour des raisons historiques, il existe des groupes spécifiques dont les autorités politiques reconnaissent un rôle spécifique. Les chambres de commerce, par exemple.
Cas spécifique de l'État
L'État dans les pays capitalistes
L'État dispose d'un «domaine privé», correspondant aux propriétés privées d'un individu ordinaire ou d'un groupe privé. Fréquemment, la distinction n'est pas bien faite entre ce domaine privé et le domaine public (la partie dont l'État est gestionnaire pour le compte de la collectivité). D'autant que occasionnellementun même bien peut appartenir, suivant les circonstances, au domaine privé de l'État ou au domaine public, et que la gestion des possessions de l'État (publiques ou privées) est l'occasion de débats autant théoriques que pratiques.
Comparé à son domaine privé, l'État se trouve en principe dans la même situation qu'un capitaliste ordinaire. Mais c'est en fait rarement le cas : les impératifs et les méthodes de gestion politiques l'emportent particulièrement le plus souvent sur les exigences économiques.
D'autre part, il arrive, dans le cadre d'une économie de marché, que l'État agisse avec une participation capitalistique, mais en recherchant une optimisation politique et non une optimisation économique de sa participation : voir économie mixte et société d'économie mixte.
L'État dans les pays «communistes»
Les communistes qui n'ont pas adhéré aux conceptions ainsi qu'aux pratiques qui ont instauré les régimes du «bloc communiste», ont dès la fin du XIXe siècle désigné par capitalisme d'État le cas où l'État est propriétaire de tout le capital (ou presque).
Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, les États soviétiques ayant pratiqué cette économie, fonctionnent sous un régime de libéralisme économique avec une privatisation quasiment totale, généralement avec une appropriation par les anciennes élites.
L'impérialisme et le colonialisme
L´impérialisme et le colonialisme ont quelquefois été présentés comme des formes extrêmes du capitalisme, surtout par Rudolf Hilferding (Le Capital financier, 1910), Rosa Luxemburg (L'Accumulation du capital, contribution à l'explication économique de l'impérialisme, 1913), ou Lénine (L'Impérialisme, stade suprême du capitalisme, 1916).
L'existence de pays capitalistes qui ne sont ni impérialistes ni colonialistes, par exemple la Suisse et les pays scandinaves, peut être présentée comme une réfutation de cette thèse. À cela, les auteurs marxistes répondent que ces pays sont de fait intégrés à un ensemble économique plus grand, dans lequel il y a une certaine division du travail entre les États.
A l'argument inverse qu'il existe des pays impérialistes qui ne sont pas capitalistes, par exemple la Rome antique ou l'Union soviétique, les auteurs marxistes répondent qu'ils ne prétendent pas que l'impérialisme est exclusivement capitaliste, mais que à un certain stade de développement, le capitalisme est nécessairement impérialiste, ce qui est fort différent.
Une puissance économique et technique (surtout en matière d'armement et de logistique) supérieure est un facteur indispensable à l'expansion impérialiste et coloniale d'un État, et de ce point de vue, du fait du capitalisme, les États européens ont été les premiers et les mieux pourvus en canons, navires et chemin de fer, conserves et moyens médicaux. Dans l'autre sens, une telle puissance économique peut rechercher des ressources qu'elle ne trouve pas ou plus sur son territoire, et le commerce pacifique n'est pas l'unique moyen d'y parvenir.
On peut remarquer aussi que, dans le cas de l'Angleterre victorienne, les échanges avec les colonies (importation des colonies vers la métropole de matières premières, de biens agricoles et textiles, poussant la production en métropole vers des biens plus élaborés) ont été un facteur favorable au développement du capitalisme. Par contre, à l'inverse, pour l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles, les richesses tirées d'Amérique du Sud ont plutôt constitué un frein qu'un moteur de développement économique.
Enfin, l'habitude prise par des gouvernements de déporter (ou de forcer à fuir) vers les colonies les criminels (ce qui incluait à leurs yeux des opposants politiques) peut aussi être mentionnée comme facteur politique favorable au capitalisme, quoique d'autre formes de répression sans lien avec les colonies ont pu avoir le même effet.
Critiques du capitalisme
Le capitalisme est l'objet de nombreuses controverses. Ces controverses peuvent porter :
- sur l'accumulation du capital en elle-même ;
- sur la propriété du capital ;
- sur le comportement des propriétaires du capital ;
- sur les conséquences humaines, sociales, écologiques et économiques d'un dispositif dont la logique de fonctionnement est la croissance du capital ;
- sur les catégories mêmes du capitalisme, comme formes sociales : le travail en lui-même, la valeur, la marchandise, l'argent. C'est une critique radicale et catégorielle du travail et de la valeur, qui n'a plus rien à voir avec la totalité des marxismes. Cette critique est portée par l'" Ecole de Krisis ", par Moishe Postone, Robert Kurz ou Anselm Jappe.
On trouve sous un régime capitaliste de nombreuses inégalités de revenu, de patrimoine, etc. La pauvreté existe, de même que la faim. Certains y voient un scandale spécifique au capitalisme, et préconisent d'autres dispositifs.
Au début du XXIe siècle, des critiques au sein même de l'establishment financier ont vu le jour devant une forme exacerbée du capitalisme, comme celle de Jean Peyrelevade qui parle de «capitalisme total»[4]. Cet auteur propose surtout d'interdire les stock-options comme part de la rémunération des dirigeants pour éviter les conflits d'intérêts et d'offrir des dividendes plus avantageux aux actionnaires anciens pour limiter les allers-retours spéculatifs.
La crise financière majeure qui frappe les marchés mondiaux suite à la crise des subprimes (février 2007) a d'autre part contribué à un regain important de critiques envers le capitalisme et l'«ultralibéralisme». Alan Greenspan, président pendant 18 ans de la banque centrale américaine et libertarien proclamé, qui défendait la supériorité de l'autorégulation des marchés sur la régulation étatique, a estimé le 23 octobre 2008 face à la commission de contrôle d'action gouvernementale qu'il avait eu «partiellement tort» de faire plus confiance au marché qu'au gouvernement pour réguler le dispositif financier. Il a d'autre part fait part de son désarroi : «J'ai trouvé une faille [dans mon idéologie]. Je ne sais pas à quel point elle est significative ou durable, mais ce fait m'a plongé dans un grand désarroi[5]» Greenspan utilise ici le mot idéologie non comme un ensemble de croyances irréfutables mais comme le cadre conceptuel à travers lequel il explique le monde[6]. Greenspan est fortement critiqué, surtout par les libéraux, pour être un des responsables de la crise en ayant conduit une politique monétaire laxiste, par absence de véritable indépendance comparé au pouvoir politique, à l'origine de l'explosion du crédit (baisse systématique des taux pour entretenir la croissance).
Financiarisation vs. capitalisme
Selon certains analystes et critiques, le dispositif économique a subi une dérive financière qui l'a éloigné du capitalisme. Le développement de la financiarisation a conduit à une économie d'endettement généralisé, s'éloignant d'une éthique capitaliste où les risques sont essentiellement assumés par les apporteurs de capital stable.
Pour d'autres la spéculation financière est inhérente au capitalisme, et la grande place accordée à la finance dérégulée a été un des leviers du capitalisme pour maintenir un taux de profit croissant malgré le ralentissement de la croissance à la fin des années 1970[7].
Le jugement des courants de pensée économiques
Marxisme
L'analyse marxiste, inspirée par Karl Marx à travers plusieurs ouvrages, dont le plus connu est Le Capital, est que dans une société capitaliste, les prolétaires sont obligés de vendre leur force de travail pour subvenir à leurs besoins. Ils sont contraints d'avoir recours à un travail salarié pour vivre.
Cette dépendance les place dans une situation d'exploitation et de domination par les capitalistes, propriétaires du capital. La force de travail seule ne produit que de la valeur d'usage, pas de valeur d'échange, elle nécessite des matières premières et des moyens de production, par conséquent l'usage de capital, détenu par les capitalistes. Le «travail vivant» (l'usage de la force de travail) est transformé en «travail mort» (le capital) [8].
Dans les entreprises qui survivent à la compétition, le salaire est moindre que ce que le travail effectué a créé comme valeur d'échange, une part étant prélevée (ou volée, selon les marxistes) par le capitaliste (propriétaire individuel, ou actionnaires). En plus de ce bénéfice, le capitaliste regagne le capital investi, qui retourne alors à l'accumulation du capital (développement de l'entreprise qui lui permettra à son tour d'acheter d'autres groupes, qui lui profiteront à leur tour, outils de marketing, publicités... ). Il s'agit pour le marxisme d'un mécanisme d'extorsion de plus-value, au détriment des travailleurs.
Le capitalisme implique aussi des crises de surproduction, car l'objectif de l'économie capitaliste n'est pas de répondre à une demande, mais d'accroître les profits du capital. À cela, les marxistes opposent la socialisation des moyens de production, qui devraient être contrôlés par la collectivité dans l'intérêt de la collectivité entière et non plus d'une classe possédante. Cette transformation des rapports de production doit entraîner dans la perspective marxiste la disparition des classes sociales.
Selon les marxistes le capitalisme oppose les êtres humains entre eux (surtout par la lutte des classes), ils souhaitent par conséquent l'abolition du capitalisme, pour remplacer la compétition par la solidarité (ce serait alors le passage d'un capitalisme beaucoup développé vers le socialisme - ou communisme).
Libéralisme classique
Pour les libéraux classiques, le dispositif ne doit pas être jugé (uniquement) en termes d'utilitarisme, mais (en particulier) d'un point de vue moral : il appartient aux seuls propriétaires des biens qui sont utilisés comme moyens de production de déterminer ce qu'ils font de ce capital. Les libéraux ne nient pas les rapports de forces économiques, mais ils nient qu'une intervention autoritaire puisse les équilibrer ou les résoudre : on peut selon eux uniquement les déplacer avec une perte due à la prise en compte de critères moins pertinents du point de vue de l'allocation optimum des ressources, et sans garantir de «justice sociale». Toute notion d'arbitrage par l'État est alors reconnue comme un leurre.
Libéralisme néoclassique
L'école néoclassique d'économie voit dans le capitalisme une coopération générale (la concurrence poussant les acteurs à se positionner au mieux compte tenu des positions des autres) qui inclut les générations passées et futures, et un accroissement de production général qui bénéficierait à tous.
Interventionnisme
Les interventionnistes de gauche et de droite jugent le dispositif à ses résultats sociaux. Selon eux, le capitalisme produit des rapports entre riches et pauvres encore plus déséquilibrés en termes de pouvoir et d'inégalités économiques, et une sclérose sociale qui nuit à l'économie générale. Il appartient alors au pouvoir politique de rétablir à la fois l'équilibre et les conditions de la prospérité générale et de développement.
Selon leur sensibilité à l'un ou l'autre aspect et leur appréciation globale de la situation, les utilitaristes préconiseront un arbitrage politique variable adapté.
Citations
Pour Fernand Braudel, il convient de distinguer «Le capital, réalité tangible, masse de moyens facilement identifiables, sans fin à l'œuvre; le capitaliste, l'homme qui préside ou essaie de présider à l'insertion du capital dans l'incessant processus de production à quoi les sociétés sont toutes condamnées» et le capitalisme qui est «en gros (mais en gros uniquement), la façon dont est conduit, pour des fins peu altruiste d'ordinaires, ce jeu constant d'insertion»[9]
Notes et références
- ↑ Larousse 2000.
- ↑ Dictionnaire historique de la langue française, édité par Alain Rey, Dictionnaire Le Robert, Paris, 1992.
- ↑ L'expression est née avant la diffusion des idées de Weber, ce qui a un impact direct sur le sens à donner au mot «capitalisme» : il faut entendre le sens de 1750-1850, et non le sens moderne.
- ↑ Jean Peyrelevade, Le Capitalisme total, Seuil, 2005
- ↑ (en) Greenspan Concedes Error on Regulation, New York Times, 24 octobre 2008.
- ↑ «remember that what an ideology is, is a conceptual framework with the way people deal with reality. Everyone has one. You have to -- to exist, you need an ideology. The question is whether it is accurate or not. » ; «Flaw in the model that I perceived is the critical functioning structure that defines how the world works, so to speak. »
- ↑ Voir par exemple cette vidéo de Michel Husson.
- ↑ Karl Marx, Le Capital, chapitre 10.
- ↑ Fernand Braudel, 1985, La dynamique du capitalisme, Arthaud, p. 52
Voir aussi
Bibliographie
- Adam Smith, Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776
- Jean-Baptiste Say, Traité d'économie politique, 1803
- Frédéric Bastiat, Œuvres économiques, 1853 (ISBN 2130378617)
- Karl Marx, Le Capital, 1867 (ISBN 978-2070355747)
- Max Weber, L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme, 1904 (ISBN 2-07-077109-1)
- Rosa Luxemburg, L'Accumulation du capital, 1913
- John Maynard Keynes, Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, 1936
- Joseph Schumpeter, Capitalisme, Socialisme, et Démocratie, 1942
- Ludwig von Mises, L'Action humaine, traité d'économie, 1949
- Raymond Aron, Dix-huit leçons sur la société industrielle, 1962
- Milton Friedman, Capitalisme et liberté, 1962
- Alain Cotta, Le Capitalisme, coll. «Que sais-je ?», 1977
- Michel Beaud, Histoire du capitalisme (de 1500 à nos jours) , Seuil, Paris, 1981, nouvelle éd. 2000, (ISBN 2-02-012035-6)
- Fernand Braudel, La Dynamique du capitalisme, 1985 (ISBN 2080811924)
- Immanuel Wallerstein, Le Capitalisme historique, 1985
- Hernando de Soto, Le Mystère du capital : Pourquoi le capitalisme triomphe en Occident et échoue partout ailleurs, 2000, (ISBN 2082105040)
Recherche sur Amazone (livres) : |
Voir la liste des contributeurs.
La version présentée ici à été extraite depuis cette source le 10/12/2009.
Ce texte est disponible sous les termes de la licence de documentation libre GNU (GFDL).
La liste des définitions proposées en tête de page est une sélection parmi les résultats obtenus à l'aide de la commande "define:" de Google.
Cette page fait partie du projet Wikibis.