Mémorandum du groupe Kronstadt

Le Mémorandum du groupe Kronstadt est un document de 82 pages rédigé et publié en 1954 par le groupe anarchiste Kronstadt membre de la Fédération anarchiste, de l'Organisation Pensée Bataille puis de la Fédération communiste libertaire dont il sera exclu.



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Anarchisme

Le Mémorandum du groupe Kronstadt est un document de 82 pages rédigé et publié en 1954 par le groupe anarchiste Kronstadt membre de la Fédération anarchiste, de l'Organisation Pensée Bataille puis de la Fédération communiste libertaire dont il sera exclu.

A la suite de cette exclusion, le groupe Kronstadt dénoncera dans ce Mémorandum les pratiques et les orientations anti-anarchistes de l'Organisation Pensée Bataille puis de la Fédération communiste libertaire.

Extraits du «Mémorandum du groupe Kronstadt»


L'O. P. B.

L'O. P. B. (Organisation «Pensée Bataille»), c'est le parti clandestin qui, aujourd'hui dirige notre F. C. L.

Ce parti s'est constitué secrètement en janvier 1950 au sein de la Fédération anarchiste dans l'objectif de transformer celle-ci en organisation de lutte de classe.

Composé d'un petit nombre de militants (dix-sept à l'origine), l'O. P. B. S'est révélée dès le départ, grâce à son caractère secret, un instrument de noyautage efficace pour conquérir les postes responsables locaux, régionaux et nationaux. 18 mois après sa création, au congrès de Lille (1951), l'O. P. B. S'assurait le contrôle absolu de la Région Parisienne.

Ces résultats ont été envisageables pour deux raisons majeures :

1) le manque de vigilance de la part des groupes ;

2) l'organisation quasi-militaire de l'O. P. B.

Depuis 1945, l'histoire de la F. A. F. N'est qu'une suite de concessions faites, congrès après congrès par les anarchistes aux responsables nationaux qui, d'années en années, élargissaient les pouvoirs du Comité National (C. N. ) au point d'en faire l'outil essentiel de l'Organisation, non seulement d'ordre administratif, mais toujours d'ordre idéologique. A l'apparition de l'O. P. B., les groupes usaient de leurs droits élémentaires d'examen des activités du C. N.

L'O. P. B., parti clandestin, a ses propres statuts et déclaration de principes. Elle dispose de militants qui, selon les statuts, avant d'être membre de la F. A. sont «avant tout aux ordres de l'O. P. B.». Elle a à sa tête un bureau composé de trois membres. Les cotisations obligatoires sont de 500 à 2 000 francs par mois et par militant. Ces cotisations donnaient à l'O. P. B. Des moyens financiers solides, utilisés par exemple pour financer les déplacements des membres O. P. B. Les adhésions à l'O. P. B. Se font par cooptation après enquête sur le passé du futur militant et sur propositions de deux parrains.

Les assemblées plénières de l'O. P. B. ont lieu l'ensemble des 15 jours, quelquefois l'ensemble des semaines. Ces réunions sont obligatoires pour tous, les décisions qui y sont prises sont exécutoires par tous, y compris ceux qui ont voté contre : le bureau de l'O. P. B. est d'ailleurs chargé de faire respecter par les militants ces décisions qui sont appliqués dans la F. A. F. (dans les groupes, au Comité de la Région Parisienne, et au Comité National).

Dans les groupes, les militants O. P. B. doivent s'assurer les secrétariats, inciter, en montrant l'exemple, au collage ainsi qu'à la criée, détecter les éléments suscptibles d'entrer à l'O. P. B. Dans les groupes toujours, les militants O. P. B. font adopter des motions allant toutes dans le même sens en vue des congrès.

Dans les comités responsables, surtout au C. N. les militants O. P. B. s'efforcent de l'emporter sur les militants F. A. F. par des votes majoritaires jusqu'au moment où le C. N. sera complètement sous le contrôle du parti clandestin. Les groupes Paris 19ième, Paris-Est , Paris 14ième, Paris 18ième, Sacco et Vanzetti, Boulogne-Billancourt, Paris-Centre, Paris-Nord, F. A. 4 (Marseille) et Narbonne sont noyautés par l'O. P. B. Et votent ensemble dans les congrès s'assurant aisément la majorité devant les autres groupes plus nombreux mais divisés.

Après le congrès de Bordeaux, la victoire de l'O. P. B. est totale. Ceux qui ne peuvent rester dans la F. A. F. se retirant et se groupant autour de l'Entente anarchiste.

Cependant au cours des années 1950, 1951, 1952, 1953 et 1954, le parti clandestin connaît des crises internes. Sur les 17 militants réunis lors de la création de l'O. P. B., il n'en reste en 1954, que six dont trois sont actuellement les 3 membres du bureau de l'O. P. B. Le parti clandestin a facilité les ambitions personnelles : progressivement, le caractère collégial de l'O. P. B. a fait place à l'autorité d'un seul : le secrétaire de l'O. P. B.

lors de sa fondation, le parti clandestin avait comme but de propager «l'Anarchisme social», il n'était nullement question d'utiliser le matérialisme historique comme base idéologique ni de vider la F. A. F. de son contenu fédéraliste pour y substituer un centralisme bureaucratique tel que nous le connaissons aujourd'hui dans la F. C. L.

Pourtant cette évolution s'est faite logiquement : l'orientation en était prise dans le moment où l'O. P. B. se formait en dehors des principes et statuts de la F. A. F. pour entreprendre un travail de noyautage.

Les antécédents de l'O. P. B.

Il serait faux de penser que dans la F. A. F. le fédéralisme était respecté avant janvier 1950, date de la création de l'O. P. B. Avant janvier 1950, il existait déjà un organisme clandestin dont les membres cooptés étaient incontrôlés par la F. A. F. Cet organisme secret était cependant admis par la totalité du mouvement... il s'agit du groupe d'auto-défense. Le groupe d'auto-défense, positionné théoriquement sous la responsabilité du Secrétaire général de la F. A. F. jouissait dans la pratique, de l'autonomie la plus complète et ne rendait de comptes à personne. Dans les congrès comme au comité national, le groupe d'auto-défense était un sujet tabou.

Quelles étaient les attributions de ce groupe ? Prétendument chargé d'assurer la sécurité de la F. A. F. en temps de paix comme en temps de guerre, le groupe d'auto-défense, sorte de gendarmerie anarchiste, a en particulier permis la réunion d'un groupe de militants qui, ensuite, au sein de l'O. P. B. se sont bien vite élevés au rang de policiers politiques.

On peut dire sans exagération que l'O. P. B. est fille de ce groupe d'auto-défense qui, dans la F. A. F., n'a jamais été combattu mais au contraire toléré par tous, malgré son caractère opposé aux principes généraux de la Fédération.

Conclusions sur l'O. P. B.

Il y a uniquement deux façons d'analyser l'affaire O. P. B. avant qu'on considère les agissements fractionnels, secrets et autoritaires avec un préjugé favorable ou défavorable. En effet, on ne peut pas évoquer d'autres raisons ou d'autres critères quant au fond de l'affaire. Le fond simple et clair, c'est le fait même : quelques militants ont organisé une société secrète au sein d'une Fédération anarchiste avec un bureau directeur, répartition des tâches, gestion, discipline quasi-militaire, statuts et objectif, ainsi qu'un but final inavoué et inavouable. Il est complexe, en effet, de prouver péremptoirement que ce but final : la bolchévisation, la prise de direction de la Fédération se trouve à la base de l'O. P. B. pour certains, cela est suffisamment rassurant uniquement, il se trouve que dans une question d'ordre idéologique et organisationnel, nous n'avons aucun droit de nous préoccuper des intentions peut-être sincères à l'origine mais qui n'étaient pas pour tout autant moins déviationnistes dès le départ. On ne peut pas introduire dans une analyse politique la notion sentimentale des «bonnes intentions» et en particulier nous ne pouvons pas le faire comme militants conscients lorsqu'il est question tout simplement des agissements complètement opposés à la base même à la doctrine anarchiste. Croire ou faire semblant de croire qu'on arrivera à mettre sur pied une organisation libertaire et fédéraliste en agissant en cachette et derrière le dos des camarades, en passant par dessus la tête des groupes et assemblées au contraire de l'ensemble des principes fédéralistes, s'assurer le contrôle bureaucratique de l'appareil organisationnel, croire qu'en organisant la dictature, on se bat pour la liberté, ne peut avoir d'autre signification que la naïveté ou alors l'absence totale de formation politique anarchiste.

Devant l'absurdité complète de cette situation, nous ne pouvons que constater – et l'ensemble des camarades conscients le feront avec nous – que l'ensemble des membres de l'O. P. B. par l'unique fait d'appartenance à cette clique cessaient d'être des militants anarchistes en vertu des statuts autant anciens que présents en vertu de l'ensemble des déclarations de principes depuis que le mouvement existe, y compris même la dernière. Nous réviserons nos positions envers ces camarades et nous les considérerons comme réintégrés au sein de la Fédération aux conditions nécessaires et suffisantes suivantes :

1) Reconnaître que l'appartenance à un groupement clandestin autoritaire, au sein du mouvement anarchiste est contraire à l'idéologie que nous défendons. Reconnaître que l'erreur provient du fait même de l'appartenance à un tel groupement et non de considérations de résultats ou de points de détail. Le principe de ces méthodes doit être condamné par une analyse idéologique sérieuse faîte ou acceptée par ces camarades.

2) Continuer à travailler au sein de la Fédération comme tout autre militant.

Nous sommes obligés de constater que S. Ninn et L. Blanchard, militants du groupe Kronstadt restent les seuls anciens membres de l'O. P. B. qui satisfont à ces conditions. Notons qui plus est que ces deux camarades mais aussi le Cde Léo, étaient exclus de l'O. P. B. depuis février 1953 à cause de leur attitude anti-autoritaire ainsi qu'à cause de leur position idéologique anarchiste.

Il serait logique d'arrêter là notre analyse et de citer pour finir une phrase de Malatesta, admirable par sa justesse et par son actualité : «Marcher vers l'anarchie ne peut pas signifier le reniement de l'anarchisme à travers la constitution d'un gouvernement de soi-disant anarchistes. Il faut tendre vers ce qu'on veut en faisant ce qu'on peut.» in Pensiero e volonta # 4, Rome, du 15 février 1924

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